Si vous lisez ce texte, c'est parce que vous voulez en savoir plus sur la philosophie avec les enfants et comment le développement de leur sens critique va leur rendre la vie bien plus facile. Dans cet article, je vais vous expliquer ce qu'il faut savoir à ce sujet, et comment le mettre à profit dans votre vie quotidienne.
C'est parti !
Alors, la philosophie AVEC les enfants, qu'est-ce que c'est ?
Pour beaucoup d'entre nous, la "philo" est un douloureux souvenir de terminale, fait de concepts abstraits et poussiéreux ; absolument pas une activité à laquelle on penserait pour nos enfants plein de vie.
Et pourtant, vous allez voir à quel point la philosophie est une expérience concrète et quotidienne à laquelle il est nécessaire de former nos enfants aujourd'hui. La philosophie est une gymnastique de pensée qui consiste à découvrir qui on est et comment trouver notre juste place dans le monde. ( écoutez ici le retour d'expérience que j'ai partagé avec Jean-Paul Mongin, fondateur des Petits Platons.)
Mais comment, concrètement, la philo peut-elle transformer la vie de nos enfants ?
1. En philosophie, les enfants apprennent à se poser des questions sur le monde qui les entoure et à développer leur esprit critique.
Les enfants s'interrogent naturellement sur le monde qui les entoure mais lorsque ces questions restent sans réponse, lorsqu'il n'existe pas d'espace-temps dans leur vie pour exprimer ces interrogations, les enfants "normalisent" leurs étonnements. Les gens qui dorment dans la rue ? Ça devient normal. Les enfants qui se battent dans la cour ? ça devient normal… Or aujourd'hui, il est essentiel de cultiver l'étonnement et l'interrogation chez nos enfants : cette quête de vérité que représente le questionnement philosophique est profondément structurante face aux mutations de notre société. Aujourd'hui plus que jamais il est essentiel que nos enfants sachent qui ils sont et ce qu'ils pensent afin que leurs choix de vie ne leur soient pas dictés par des influences extérieures. je pense en particulier aux les géants de la consommation et/ou aux mouvements d'idées extrémistes.
Concrètement, à La Carabane, comment ça se passe ? Pas question d'enseigner des concepts compliqués, ce n'est pas le propos. Ce qui importe c'est d'apprendre à s'interroger, à remettre en question. Chaque question philosophique peut être abordée via une question très simple et accessible aux plus petits :
- Faut-il toujours dire la vérité ?
- A quoi sert la peur ?
- Qu'est-ce que la vraie richesse ?
Aucune nécessité de connaitre les théories philosophiques pour aborder ces sujets lorsqu'on a 6 ou 7 ans. Avec leur bon sens et leurs observations de la vie, les enfants répondent à ces questions et construisent ainsi collectivement leur premiers raisonnements à visée philosophiques. Un grand principe dans ces ateliers est de ne jamais mettre l'enfant en difficulté : on leur pose des questions dont on n'attend pas qu'il donne la "bonne réponse" mais que chacun suive son raisonnement et trouve sa propre réponse. Ainsi, chacun apprend à savoir qui il est, ce qu'il pense et se construit. Un jour chez Fleururs, un petit garçon ne voulait pas lâcher la parole. À chaque question, il avait quelque chose à dire. Je crois que je n'avais jamais vu un enfant qui voulait autant s'exprimer ! A la fin de l'atelier, sa maman vient me voir, très émue, me disant que ça fait deux fois qu'elle est convoquée par la maitresse car son fils n'ouvre pas la bouche à l'école. Que s'est-il passé ? Je ne sais pas. Je lui ai juste dit qu'on ne jugerait pas ce qu'il dit et que personne n'avait le droit de se moquer. La philo libère la parole des enfants et apprendre à nos enfants à ne pas se taire est aujourd'hui plus important que jamais. ( Lire aussi "Apprenons-leur à ne pas se taire)
2. En philosophie, les enfants apprennent à exprimer leurs désaccords avec des mots.
"Je l'ai tapé parce qu'il m'a traité !"…
Le premier point que les enfants apprennent en philo, c'est que ce n'est pas grave d'avoir un avis différent de celui des autres et que chacun a le droit d'avoir ses propres idées. En d'autres mots, ce n'est pas parce que nous ne sommes pas d'accord que nous ne pouvons pas être ami. Comme disait Felix, 7 ans dans l'émission de France Inter (à écouter si vous avez 4mn car c'est délicieux;-) : "C'est plus intéressant quand on n'est pas d'accord !"
Concrètement, dans la vie quotidienne de nos enfants, l'intégration au groupe est essentielle. Faire "partie de la bande" est le premier levier de socialisation, comme dans tout système humain d'ailleurs. Les enfants ont souvent peur du jugement des autres et adoptent parfois des comportements qui ne leur sont pas propres pour rester intégré. C'est le cas par exemple dans les faits de harcèlement où l'effet de groupe entraine chacun à suivre un mouvement qu'il n'aurait pas spontanément initié. (A ce sujet, vous pouvez lire "Rouge" avec vos enfants…)
Dans les ateliers philo, les enfants apprennent à exprimer leur propre avis et à prendre position en toute sécurité. Ils savent qu'ils sont à l'abri des conséquences négatives : pas de moqueries, pas de jugement. Rapidement, ils se libèrent du regard des autres et parviennent ainsi à exprimer leurs opinions librement. D'ailleurs, après 2 ou 3 ateliers, les enfants se mettent à dire : Je ne suis pas d'accord avec l'idée de Félix…" plutôt que "Je ne suis pas d'accord avec Felix." Cette prise de distance est essentielle pour faire société avec intelligence. Cette conséquence directe des ateliers philo est confirmé par une étude récente très détaillée qui démontre que les violences diminuent dans une classe lorsque les enfants font de la philo car ils apprennent à exprimer leurs désaccords verbalement et non en se tapant dessus. La philosophie apprend à se connaitre mais aussi à respecter l'autre comme être pensant différent de soi et nécessaire à la diversité d'opinions qui compose une société.
3. Et en philosophie, l'enfant apprend qu'il est un interlocuteur valable* et qu'il peut discuter avec vous
...car à la maison, c'est pareil !
J'ai reçu récemment l'appel d'un papa très décontenancé par les questions que lui posait sa fille sur la mort. Il me demande alors : "Qu'est-ce que je lui réponds ?"
Beaucoup de parents sont désemparés face à certaines questions, en particulier celles qui concerne les sujets lourds avec lesquels nous-même ne sommes pas à l'aise. Or les enfants adorent parler de la vie et de la mort même si ça les effraie. Et souvent, ils sont très pragmatiques : comme disait Alma du haut de ses 5 ans, "la naissance ça fait hyper peur, parce que quand tu arrives, tu ne connais personne !"
Arrêtons d'être intimidés par les sujets lourds que souhaitent aborder nos enfants ! Ils font partie intégrante de la vie. Vous avez tous une réponse à leur donner : la vôtre. LA réponse que votre enfant attend, c'est ce que vous pensez. Faites vous confiance ! Vous lisez mille articles sur l'éducation, vous assistez à des conférences, vous lisez notre newsletter ;-)… mais ce que votre enfant vous demande, ce n'est pas la réponse que Françoise Dolto vous aurait conseillée de faire… C'est la vôtre, celle qui vient de votre coeur et de votre histoire et que vous avez la générosité et le liberté de partager avec votre enfant qui se sent alors à vos yeux un interlocuteur valable*, libre de partager ses opinions et interrogations avec vous, sans crainte d'être jugé, dans ce partage de confiance et d'amour inconditionnel.
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Et pour aller plus loin, inscrivez votre enfant aux ateliers de Philo+Dessin de la Carabane le plus proche de chez vous.
*interlocuteur valable : concept développé par Jacques Levine. Ce concept est ma raison personnelle de faire de la philosophie avec les enfants.
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