On dit que "la vérité sort de la bouche des enfants."
C'est vrai.
Pourtant, on les écoute peu. Ne serait-ce que la magnifique prise de parole de Greta Thunberg à la Cop 24, vaut la peine qu'on s'attarde sur cette question. On écoute peu les enfants car ils ont dans notre société une posture "d'apprenant" et ça les rend souvent furieux de ne pas être considérés comme des interlocuteurs valables.
Mais si on s'ouvre à la liberté de les écouter, on découvre alors des pépites de bon sens et de liberté de pensée, oubliées dans notre enfance, lorsque notre "moi" avait encore toute sa place et qu'il s'exprimait joyeusement. Par leur méconnaissance du fonctionnement de notre société et leur absence de stéréotypes (globalement…) ils observent leur environnement avec un bon sens désarmant. Ecoutons-les, ils vont nous offrir :
1. leur sens aigu de la justice et de l'humanisme :
Il y a des choses qui sont incompréhensibles pour un enfant : les gens qui habitent dans la rue par exemple. "Pourquoi on ne les invite pas à la maison ?", "pourquoi je peux pas lui donner mon lit et un doudoou ? C'est mon lit, c'est moi qui décide."
Que répondre ? Notre angoisse du vol, de la saleté ? Notre peur de l'inconnu ? Répondre que "c'est comme ça" n'est pas une réponse recevable pour un enfant à qui on transmet des valeurs de partage et de générosité. J'étais personnellement très embêtée d'être en totale contradiction avec ce que je transmets au quotidien à mes filles : la générosité, la tolérance… "Fais ce que je dis, pas ce que je fais" ? Quel poids donne-t-on alors à nos paroles ? Mais restons pragmatiques ; sans considérer cela comme une "bonne leçon", c'est là l'opportunité d'aller vers une vie plus cohérente avec nos valeurs, tout en respectant nos limites.
2. leur instinct primitif de liberté, leur voeu de retour à l'état de nature
Un jour, c'est Marin, 6 ans, qui déclare avec envie que "Si les animaux vivaient en ville, ils auraient des habits mais là, ils vivent dans la nature, libres !" ou encore Emma, qui du haut de ses 8 ans affirme que "(Gagner de …) l'argent, c'est une perte de temps : on veut toujours en avoir plus. Si l'argent n'existait pas, on verrait plus nos parents". Essayons un instant d'imaginer ce que serait notre monde sans argent ; utopiste mais nécessaire pour envisager les choses sous un autre angle. La remise en question du fonctionnement de notre société, même si elle ne mène pas à la révolution est un exercice intellectuel intéressant que nous offre la vision naïve des enfants. En posant des questions qui dérangent, l'enfant joue son rôle d'esprit libre. C'est son devoir de remettre en question nos convictions en confrontant sa vision du monde à la nôtre et en nous forçant au questionnement, avec toutes la tendresse de ces petits mots….
3. leur humour !… parfois involontaire mais toujours poétique :
"La naissance, ça fait hyper peur parce que quand tu arrives, tu connais personne." Alma, 6 ans. "Le lion, il mange sa viande crue car il n'a pas d'argent pour s'acheter un four." Felix, 6 ans. Ces petites phrases magiques que certains parents notent soigneusement sont des pépites de poésie et de naïveté. Profitons-en ! Et laissons nos enfants prendre la parole. C'est tellement fondateur pour eux ! …et tellement enrichissant pour nous. Car ce que je peux affirmer, après 2 ans dans les ateliers de la Carabane, c'est que la philosophie sort de la bouche des enfants !
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