On croit parfois que philosopher avec les enfants est une pratique marginale et optionnelle. C'est faux.
La pratique de la philosophie avec les enfants en ateliers est une urgence éducative et voilà pourquoi : parce qu'ils y font l'expérience de la pensée consciente et qu'ainsi ils s'ouvrent au monde sans peur.
"Moi ce que j'aime à la philo, c'est qu'on peut jamais se tromper !"Ce qu'exprime Félix, 7 ans, dans cette émission de radio, c'est le droit à l'expression. Or l'expression, c'est la vie : c'est la connaissance de soi et c'est le lien vers l'autre !
les 3 superpouvoirs de la philosophie pour les enfants
1. Devenir soi, ou la version adaptée de "Je pense donc je suis".
Le premier "superpouvoir" développé par les ateliers de philo+dessin est la prise de conscience par l'enfant qu'il est un "interlocuteur valable". Ce concept, développé par Jacques Levine est fondateur de la personnalité et de l'individualité de chacun. Il permet aux enfants de découvrir que leurs idées les définissent et qu'elles ont une place. C'est le "je pense donc je suis" de Descartes. Cela leur permet de sortir de leur posture d'enfant -même s'ils n'ont pas l'expérience de la vie pour nuancer leurs propos,- de devenir acteur de leur existence et non spectateur d'un show qui se joue sans eux. C'est pourquoi apprendre très tôt à savoir ce qu'on pense est un atout majeur dans la construction de l'identité.
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2. Développer sa capacité de raisonnement et exprimer son opinion.
Lors des ateliers, l'animateur pose aux enfants une question parfois très abstraite qu'ils ont besoin de reformuler pour y répondre. "Peut-on faire le mal pour faire le bien" est un exemple que nous avons abordé récemment avec des petits de 5 ans. Le fait de conceptualiser ce qu'est "le Bien", ce qu'est "le Mal" ouvre aux enfants des champs de réflexions dont ils n'ont pas conscience, les oblige, pour accéder à ces concepts, à poser individuellement une première définition. Par la définition les enfants précisent leurs idées. Ils en viennent ensuite à les exprimer au sein du groupe, à les confronter à celles des autres. Argumenter, raisonner, débattre, en développant ainsi des conduites sociales et cognitives structurées, les enfants apprivoisent très tôt un mode d'expression engagé.
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3. Savoir écouter et apprendre la tolérance.
Une des observations qui m'a le plus surprise lors des ateliers philo+dessin de la Carabane, c'est la déception qu'ont les enfants lorsqu'ils sont d'accord sur un sujet, car alors il n'y a pas de débat. Il n'est pas rare que les enfants demandent à "changer de question" lorsqu'ils sont tous du même avis car "c'est beaucoup plus intéressant quand on n'est pas d'accord !" Après quelques ateliers, les enfants ont la maturité de dire "je ne suis pas d'accord avec l'idée de Charlotte" et non plus "je ne suis pas d'accord avec Charlotte". Cette prise de distance est essentielle dans le débat et témoigne de la maturité des enfants.
Mais pour être capable de ces réflexions, les enfants ont d'abord appris à écouter. Ils ont appris à écouter les autres enfants et à mettre leur opinion en regard de ce qu'ils entendent chez les autres. Ainsi, lorsqu'une opinion différente n'est plus perçue comme une menace mais comme un enrichissement du débat d'idées, alors on accède à des échanges respectueux de l'opinion de chacun et de l'individualité de tous.
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Il existe de nombreuses autres raisons pour lesquelles je développe la Carabane et pour lesquelles je me sens alignée avec mes convictions lorsque mes enfants participent aux ateliers philo+dessin mais je vous expose ici les principales. Donnez-nous votre avis ; c'est toujours un grand enrichissement pour nous et n'hésitez pas à me faire part des petites pépites qui émergent dans vos discussions avec vos enfants. C'est toujours un bonheur de les partager avec vous !
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